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1. Rechercher les conditions d’une émergence

par Sylvie Pouteau

Etre capable de s’unir dans une action commune, c’est ce qui a mobilisé les forces disponibles de PEUV en 2009, en permettant ainsi d’expérimenter la rencontre dans la diversité et le pluralisme sur un thème spécifique, la relation Homme-Plante (LIEN : Nos événements passés). Mais le projet de PEUV n’est pas de créer une université de la relation Homme-Plante. Comment donc étendre à une échelle plus large, multidimensionnelle, le processus expérimenté ? C’est l’objet du nouveau chantier de PEUV, intitulé « projet transversal », qui a démarré en 2010 et se poursuivra en 2011.

Ce qui caractérise avant tout cette étape de construction vers une université du vivant, c’est la décentralisation des initiatives engagées, placées chacune sous la responsabilité d’une organisation, membre ou sympathisante. Cela signifie une démultiplication des possibilités d’actions et une ouverture à de nouvelles interactions entre partenaires et avec le monde. Cela signifie surtout l’expression et la valorisation d’expériences et d’intérêts différenciés, permettant une diversification non plus seulement à l’intérieur d’une action donnée, mais entre actions. Une diversification à la fois en termes de thèmes et de questions, de mises en œuvre et de processus, d’objectifs et de résultats. Autant d’aspects qui seront retransmis au fur et à mesure des avancées (LIEN : Nos prochains événements).

Se différencier, au sens biologique, c’est déjà commencer à s’organiser, c’est cesser de se répéter en plus ou moins grand, c’est devenir radicalement un autre, ou plutôt : un autrement soi-même. Ainsi, pour prendre une image, l’œuf en croissance ne peut conserver sa forme sphérique au-delà d’une certaine taille, d’un certain nombre de divisions cellulaires. Il lui faut se transformer et se différencier : il bourgeonne, s’enroule, se creuse et se replie. Ce faisant, de nouvelles formes, de nouveaux organes, de nouvelles fonctions apparaissent. Au cours de la différenciation, il va falloir continûment trouver de nouvelles marques, des marques en constante transformation, en permanente évolution au sein d’une organisation non hiérarchique. Mais comment décentraliser sans pour autant perdre le centre, c’est-à-dire le noyau du projet, et sans défaire la cohésion d’ensemble ?

C’est ici que s’affirme la spécificité de PEUV, qui dans un même geste encourage la diversité, la multiplicité, et y cherche le rassemblement, l’unité. Traduit par « transversaliser », ce geste implique un certain renoncement à privilégier tel ou tel point de vue, et invite au contraire à aller des uns aux autres, les faire se rencontrer, mutualiser leurs apports et tracer des lignes invisibles entre tous. C’est déplacer à l’échelle du projet entier le processus expérimenté précédemment au cours d’un seul séminaire de travail.

Et changer d’échelle, c’est créer des conditions d’émergence, comme dans le cas de l’œuf, c’est-à-dire d’apparition de structures ou d’événements inédits, et non prévisibles par une logique linéaire. Créer des conditions d’émergence, ce n’est pas pour autant renoncer à toute forme d’anticipation sur ce qui peut, ou veut, advenir. Il s’agit au contraire de redoubler d’attention et d’écoute au langage et aux signes de l’action en train de se faire, de devenir « lecteur » de l’émergence. L’émergence d’une troisième phase d’organisation de PEUV peut-être, ou, qui sait, de l’université du vivant elle-même ?

Sylvie Pouteau